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13 mars 2013 3 13 /03 /mars /2013 17:58

arton5240.jpgPar Aristide Leucate *

Les résultats des dernières élections législatives italiennes qui virent la relégation du technocrate, Mario Monti (aux alentours de 10% des suffrages), en même temps que la percée de la coalition de gauche de Pier Luigi Bersani, tandis que la droite (30,71%) s’impose au Sénat, ces résultats, donc, sonnent comme un réveil des peuples trop longtemps en léthargie.

Le politologue du Système, Dominique Reynié, s’étrangle à propos d’une supposée « flambée populiste » qui embraserait toute l’Europe : « les populistes sont des hackers : ils ‘‘plantent’’ le système. On sait bien qu’ils n’ont aucune solution, ils ne savent pas quoi faire de leurs élus, mais ils canalisent les mécontentements et les frustrations sur le terrain des lâchetés et des incohérences des élites » (Le Monde, 27 février).

« Reyniégationnisme »

La véhémence, quasi-hystérique, de tels propos dans la bouche d’un professeur à Sciences Po., témoigne d’une mauvaise foi évidemment dénuée de toute scientificité parce que dictée exclusivement par l’émotion et la panique. On ne sait d’ailleurs pas de qui, précisément, parle notre « expert ». On rappellera que celui-ci a commis, en 2011, chez Plon, un pompeux et indigeste Populismes : la pente fatale, dans lequel il osait affirmer, avec un mépris culotté et un art consommé de la tartufferie, notamment, que : « ce n’est pas faire insulte aux électeurs qui ont refusé l’Europe au cours des derniers référendums de montrer que la xénophobie et le populisme ont contribué de manière déterminante à la victoire du ‘‘non’’. Tous les électeurs du ‘‘non’’ ne sont pas populistes et xénophobes, mais tous les populistes et les xénophobes ont voté ‘‘non’’ » (p.116). Soumises à la lumière crue des déclarations précitées, ces phrases prennent un tout autre sens dont la limpidité n’en révèle pas moins la conviction profonde de leur auteur : les peuples, habilement assimilés aux « populistes », sont d’infréquentables et dangereux « xénophobes » qui votent très mal et sont indignes du meilleur des mondes européo-mondialisés possibles. Autant dire, le degré zéro de la pensée sociologique et politique, le soi-disant « chercheur » ne s’interrogeant nullement, ni sur la signification polymorphique du terme populiste, ni sur la raison d’être politique d’un mouvement qui a, a minima, le peuple pour noyau atomique.

Le respect du peuple

Comme le rappelle opportunément, Vincent Coussedière, « ‘‘populisme’’ servait d’abord à désigner des mouvements d’émancipation du peuple » (Eloge du populisme, Elya Editions, 2012). Dans son sens actuel, « le populisme est le retour du refoulé de l’existence des peuples » (Le Spectacle du monde, novembre 2012). En outre, Coussedière rejoint le penseur américain, Christopher Lasch (Le seul et vrai paradis. Une histoire de l’idéologie du progrès et de ses critiques, Flammarion, 2006) quand ce dernier, se livrant à une généalogie des populistes fondée sur les révoltes paysannes qui secouèrent le sud des Etats-Unis, à la fin du XIXe siècle, dégageait en même temps l’eidos de leur éthique, ni « libérale ou ‘‘petite-bourgeoise’’, au sens où le XXe siècle entend ces termes », certes « anticapitaliste, mais ni socialiste, ni social-démocrate, à la fois radicale, révolutionnaire même, et profondément conservatrice ». Avant d’être un demos ou peuple politique, celui-ci est d’abord un ethos, qu’une longue histoire parachève et consolide en ethnos. Par définition, le peuple ne peut qu’être conservateur, moins par ses acquis (parfois arrachés de haute lutte), forcément contingents, que par sa vertu intrinsèque, que Lasch avait bien perçue, le respect : « le populisme souscrit sans équivoque au principe du respect. C’est entre autres pour cette raison que l’on doit préférer le populisme au communautarisme, trop prompt au compromis avec l’Etat providence et à adhérer à son idéologie de la compassion. Le populisme a toujours rejeté une politique fondée sur la déférence aussi bien que sur la pitié. Il est attaché à des manières simples et à des discours simples et directs » (La révolte des élites et la trahison de la démocratie, Climats, 1996, p.114). Lasch met ainsi l’accent sur l’authenticité profonde qui caractérise le populisme. En cela, il s’oppose frontalement aux élites, lesquelles nourrissent envers lui un dénigrement hautain ou, au mieux, une commisération ayant valeur d’absolution des prétendus errements électoraux du peuple. C’est cette détestable compassion, « devenue le visage humain du mépris », selon Lasch, que rejettent les peuples dans leurs fractions radicales (dans l’acception littérale du terme), désormais excédés de cette infantilisation de masse visant à minorer leurs responsabilités les plus élémentaires (telles, par exemple, que l’éducation de leurs enfants prise autoritairement en charge par la puissance publique, ou la ponction fiscale excessive, véritable capitis diminutio du droit de propriété, dont Lasch observait qu’il a toujours historiquement constitué « la base nécessaire de la vertu civique » (Ibid., p.101).

Une réaction « souverainiste »

Les chantres de la « nouvelle classe mondiale » ne s’y trompent guère quant aux procès en sorcellerie qu’ils font systématiquement aux peuples et aux populismes. Délibérément détourné dans un sens explicitement péjoratif, le populisme revêt une connotation foncièrement négative qui tendrait à confondre abusivement (mais à dessein) le peuple et la foule, ce, aux fins de susciter la révulsion, la pensée politique du premier étant commuée, par la seconde, en instinct sauvage. Sur ce point, les travaux du philosophe argentin, Ernesto Laclau, permettent d’éclairer cette peur viscérale des élites à l’endroit de leurs gouvernés. Niant le peuple en tant qu’entité politique par excellence, ses votes ou ses réactions sondagières sont, dès lors, scrutés et analysés sous un angle exclusivement pathologique et symptomatique, pour ne pas dire psychanalytique. Partant, et l’apport de Laclau est pertinent sur ce point, c’est l’identité sociale du peuple qui est balayée d’un revers de main (La raison populiste, Seuil, 2008). Mais si l’on ose aller jusqu’au bout du raisonnement, c’est la souveraineté même du peuple, c’est-à-dire, son obstination à demeurer, en toutes circonstances, « maître chez soi, autant que maître de ses choix », selon l’expression du juriste Michel Clapié, qui est mise en cause par l’Oligarchie a-représentative. Aussi, en paraphrasant Coussedière, le populisme serait d’abord le retour du refoulé des souverainetés bafouées et bradées. C’est d’ailleurs ce qui caractérise, en propre, les populismes européens. Bien sûr, tous ne sont pas « souverainistes », au sens où on peut l’entendre en France, par exemple, avec le mouvement SIEL de Paul-Marie Coûteaux. Mais tous ont, prosaïquement, pour dénominateur commun, une volonté de refondation totale de l’Union européenne conjuguée à une reviviscence des identités nationales. Ces populismes témoignent d’un farouche désir de réappropriation d’un destin trop longtemps confisqué par des mains devenues incapables donc illégitimes. Ce volontarisme se retrouve aussi bien en Grèce (Aube dorée et Syriza), qu’aux Pays-Bas (Parti de la Liberté), au Royaume-Uni (British National Party ou English Defense League), en Hongrie (Jobbik et Fidesz), au Danemark (Parti du peuple danois), en Suisse (Union démocratique du centre), en Italie (Casa Pound) qu’en France avec le Front national ou les Identitaires. La saine réaction des peuples est la condition du regain des souverainetés.

aleucate@yahoo.fr - L’AF 2858

* Aristide Leucate est rédacteur à L’AF 2000, spécialistes des questions sociales et politiques

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la Jeanne 2013

 

Les Royalistes dans la Résistance

Conférence de Marc Savina (vidéos)

Les vendredis soirs, à l’exception des périodes de vacances, le Centre Royaliste d’Action Française (10, rue Croix-des-petits-champs) ouvre ses portes à tous pour des conférences gratuites sur des sujets historiques ou d’actualité. Pour vous tenir informé des conférences à venir, reportez vous à la partie agenda du site, et pour savoir à quoi ressemblent ces conférences, jetez donc un œil à celle-ci qui traite brillamment de ce sujet méconnu : les royalistes dans la résistance !

 

 

Jean-Baptiste Biaggi, résistant et membre de l’Action française

membre de l’Action française

Jean-Baptiste Biaggi, résistant et membre de l’Action française

A l’image des jeunes lycéens qui manifestèrent le 11 novembre 1940, c’est de l’Action française que vinrent les premiers résistants. Des noms comme ceux d’Estiennes d’Orves ou du maréchal Leclerc sont dans toutes les mémoires. D’autres, moins connus et innombrables, prouvent qu’il était possible, si ce n’est logique, d’être résistant quand on était royaliste.

 

Comment avez-vous connu l’Action française ?

Jean-Baptiste Biaggi : dans mon petit village de Cagnano, en Corse, il y avait un curé, Ange Giudicelli, qui était maurrassien. Il y avait aussi un marin retraité abonné à l’Action Française. Je lisais donc l’Action Française, malgré l’interdiction du vatican. Ensuite j’ai été étudiant d’Action française et délégué de l’Action française à la faculté de droit. et c’est moi qui à ce titre, faisais le discours de bienvenue de Charles Maurras qui tous les ans, venait présider le banquet des étudiants d’Action française. J’assistais régulièrement à ses conférences.

Quel fut votre parcours dans la Résistance ?

 Jean-Baptiste Biaggi : Durant la guerre, j’ai combattu, j’ai été blessé. Déclaré inapte à tout service, j’ai passé ma convalescence à Marseille, où je marchais avec deux cannes. C’est là que, par hasard, je rencontre Alain Griotteray. Nous sympathisons et il me demande d’organiser des passages de courriers, de renseignements vers l’Afrique du Nord. A partir de 1942, j’ai organisé le passage par l’Espagne de volontaires. Je continuais aussi à fournir du renseignement. Vous savez, le renseignement, c’est beaucoup plus utile qu’un petit meurtre à la sortie d’un métro parisien. Et puis ça ne provoque pas de représailles sur la population. On se fait prendre, on est fusillé, tout au plus avec ses complices. Mais le charcutier du coin et l’institutrice du village voisin, ils n’ont rien.Je suis allé quelques fois à Vichy, pour faire du renseignement. J’y ai rencontré un ancien camarade de Droit, Joseph Barthélémy, devenu ministre de la Justice de Vichy. Il m’a dit : "A Vichy, il y a plus de résistants que partout ailleurs !"

Ensuite, j’ai été arrêté et mis dans un train de déportation vers Bergen-Belsen. De ce train, je me suis évadé, grâce au corset médical qui me maintenait depuis mes blessures au ventre et au dos. Grâce à l’abbé Le Meur, et à la complicité d’un gardien du camp qui voulait déserter, j’ai remplacé les baleines du corset par des scies à métaux et un tournevis.J’ai ensuite organisé une évasion massive du convoi. Durant le transport, nous sommes quarante-cinq à avoir tenté et réussi l’évasion ! Pour cela, nous avons dû maîtriser les autres prisonniers qui menaçaient de nous dénoncer aux SS ! J’ai repéré le meneur, j’ai saisi mon tournevis, le lui ai mis sur le ventre et je lui ai dit : "Maintenant tu fermes ta gueule ou je te crève !" Il a compris. A cinq, nous avons gagné un petit village, où nous avons été hébergés et cachés par le jeune curé de la paroisse. Puis nous nous sommes procurés de faux papiers grâce à ce curé et au maire corse du village ! Nous avons même dormi dans les salons de la préfecture !De retour à Paris, j’ai repris mes activités à Orion jusqu’à la fin de la guerre. Puis j’ai rejoint les Commandos de France.

La doctrine maurrassienne a-t-elle influencé votre engagement dans la résistance ?

J.-B. Biaggi : c’est véritablement la haine des Allemands qui a motivé mon engagement. L’amour de mon pays martyrisé par ceux que nous appelions "les Boches", et la germanophobie en soi. Il n’y a pas eu de complication dialectique ou intellectuelle, comme chez certains qui ne résistent qu’à partir de 1941 par pure stratégie idéologique. Nous avons eu l’instinct de la Résistance, car Maurras nous avait parfaitement formés. Les Allemands étaient chez nous ; ils ne devaient pas y rester. Donc il fallait les chasser. C’est ce à quoi nous nous sommes employés. Nous avons tenté de toutes nos forces, de chasser les envahisseurs. Ce dont nous avions conscience, c’est de l’intérêt supérieur du pays. C’est ça, le fond de la doctrine maurrassienne. Que Maurras ait eu une autre méthode que nous pour remédier à la crise, c’est conjoncturel. Je le dis très franchement et même fièrement : j’ai toujours été maurrassien ; je le suis toujours resté ; et à mon âge, je crois bien devoir vous dire que je le resterai toujours. La Résistance était un réflexe patriotique. L’école politique qui enseignait le patriotisme au plus haut degré, c’était l’Action française.

 

Un dernier mot sur Maurras ?

J.-B. Biaggi : Il faut raconter une anecdote de Marcel Jullian répondant à un proche du général De Gaulle qui, après la victoire, lui reprochait son attachement à Maurras, coupable d’intelligence avec l’Allemagne : "Vous avez très mal choisi, monsieur. Maurras avait toutes les formes possibles de l’intelligence, sauf celle là !"

 

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