Les mots sont souvent, non les signes, mais les masques de la réalité. Parfois même la fréquence de leur emploi doit alerter sur l’absence de la chose qu’ils désignent. La France est-elle un État de droit, une république, une démocratie ? Plus ces mots sont employés avec le ton solennel et pontifiant conseillé, plus l’évolution politique permet d’en douter. Mon expérience concrète m’assure qu’elle ne l’est plus.
Je vis depuis plus de huit ans une chasse aux sorcières qui a torpillé mon activité politique. Il y a un an, interrogé par un site catholique confidentiel sur la raison pour laquelle une majorité des Français semblait favorable au mariage homosexuel, je développais la thèse suivant laquelle le « lobby gay » disposait d’une puissance médiatique disproportionnée, dont les adversaires du mariage unisexe prennent sans doute conscience en ce moment même. Fort de sa domination dans les médias, il use d’une désinformation systématique, notamment fondée sur la victimisation des homosexuels.
Je prenais l’exemple de la légende de la déportation des homosexuels en France, à l’exception des trois départements rattachés au Reich. Serge Klarsfeld confirmait mes propos. La lecture de l’étude menée par Mickaël Bertrand ou de l’ouvrage de Patrick Buisson sur les Années érotiques de l’occupation me donne entièrement raison. Cela n’a pas empêché les crétins de l’UMP, ni la presse pavlovienne de me traiter de tous les noms. Sarkozy s’y est mis. Bien sûr la gauche s’en est donnée à cœur joie. C’était la démonstration de la justesse de mes propos puisque tous étaient convaincus d’une chose totalement fausse.
Comme il y a des limites à la bêtise qui la rend insupportable, j’ai assigné ceux qui osaient parler à mon encontre de négationnisme. Je n’ai jamais nié la déportation, ni les six millions de victimes de la Shoah, et ceux qui m’ont entendu à Auschwitz parler au nom du groupe UMP que j’y représentais ne peuvent avoir le moindre doute à ce sujet. Ce que je nie, c’est l’existence d’une politique de déportation des homosexuels français depuis le territoire national, par les Allemands, les collaborateurs ou les « autorités » de Vichy. J’ajoute que beaucoup d’homosexuels n’ont pas eu à se plaindre de leur situation à cette époque, à commencer par le ministre de Pétain, Abel Bonnard, et bien d’autres. Ce que je dénonce c’est la manœuvre victimaire fondée sur le mensonge afin de créer un climat favorable aux revendications.
J’ai donc assigné L’Express qui avait utilisé ce terme de « négationniste » à mon encontre. LE PROCÈS N’AURA PAS LIEU. LE DOSSIER A DISPARU, le temps du délai de prescription. Si ça vous rappelle la Scientologie, je crains que vous n’ayez raison.
Mon avocat a donc écrit une lettre ouverte au ministre de la Justice. Celle-ci l’informe que j’engage une action en responsabilité pour faute lourde et déni de Justice contre l’État français. Je déposerai, par ailleurs, une plainte pour vol afin qu’on puisse savoir qui a subtilisé le dossier le temps de la prescription. Lorsque la République ne traite pas tous les justiciables avec égalité, elle n’est plus la République. Lorsqu’une démocratie privilégie des minorités, elle n’est plus une démocratie. Lorsque la Justice trébuche ou devient partiale, l’État de droit disparaît pour ne laisser place qu’à un rapport de forces.
C’est d’ailleurs ce qu’a reconnu avec cynisme le rapporteur au Sénat de la la loi sur le mariage et l’adoption pour des personnes de même sexe, Jean-Pierre Michel, en affirmant que le « juste » était ce qui est conforme à la loi, et la loi, l’expression d’un « rapport de force à un moment donné ». Un parlementaire juriste qui fait dépendre le droit de la force, ça fait froid dans le dos, mais peut-être cela éclairera-t-il ceux qui ont un doute sur la nature du pouvoir actuel.
Christian Vanneste